Nouvelle loi énergie : le canton de Vaud entre dans une ère de transition ambitieuse

Le canton de Vaud franchit une étape majeure dans sa politique énergétique avec l’adoption en septembre 2024 du projet de loi sur l’énergie (abrégé LVLEne) par le Conseil d’État vaudois. Transmis au parlement cantonal, ce texte doit, après passage législatif, entrer en vigueur au premier semestre 2026.
Cette réforme législative s’inscrit dans le cadre du Plan climat et du programme de législature du canton, qui visent une réduction de 60 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 et l’atteinte de la neutralité carbone au plus tard en 2050.

Pourquoi cette réforme est-elle indispensable ?

Au cœur de la stratégie énergétique vaudoise se trouve la reconnaissance que les bâtiments, les systèmes de chauffage et l’énergie grise sont des contributeurs essentiels aux émissions de gaz à effet de serre. Le nouveau cadre légal répond à l’urgence climatique mais aussi à la volonté de renforcer la souveraineté énergétique locale et d’optimiser les ressources renouvelables.
Il s’agit donc non seulement d’une adaptation réglementaire, mais d’un changement complet de paradigme : de la consommation passive à la production proactive, de l’importation d’énergie à la valorisation locale.


Six mesures phares pour accélérer la transition énergétique

Le projet de loi décline six axes stratégiques chers à la transition :

  1. Assainissement des bâtiments énergivores
    L’effort porte d’abord sur les « passoires énergétiques » (catégories F et G), près de 28 000 bâtiments dans le canton. L’objectif : augmenter le taux de rénovation pour améliorer massivement l’efficacité thermique.
  2. Fin des chauffages fossiles
    Les systèmes de chauffage fossiles — actuellement responsables de 38 % des émissions de gaz à effet de serre dans le canton — feront l’objet d’un remplacement systématique en fin de vie.
  3. Sobriété énergétique et lutte contre le gaspillage
    Réduction de l’éclairage commercial et public, diminution de l’énergie grise dans la construction neuve, sensibilisation renforcée : autant d’actions pour que la sobriété devienne un réflexe.
  4. Développement du solaire
    Le solaire (photovoltaïque) doit trouver sa place en priorité sur de nouvelles constructions, dans les rénovations et sur tous bâtiments d’ici 2040.
  5. Priorité aux énergies renouvelables locales
    Valoriser le potentiel géothermique et photovoltaïque vaudois, encourager l’utilisation d’énergies locales plutôt que de sources éloignées.
  6. Accompagnement renforcé
    Financièrement (subventions publiques), administrativement (allègement des procédures), humainement (offensive de formation) : les acteurs sont soutenus pour réussir cette transition.

Adaptations suite à la consultation publique : le cas concret du cantonal

L’avant-projet de loi a fait l’objet d’une large consultation publique automne 2023, avec des séances d’information et des rencontres avec les parties prenantes — notamment le conseiller d’État Vassilis Venizelos.
À l’issue de cette consultation, plusieurs ajustements ont été apportés :

  • **Différenciation selon taille et type de propriété ** :
    Grands propriétaires (bâtiments > 750 m², catégorie F/G) doivent assainir d’ici 2035. Petits propriétaires (< 750 m²) auront jusqu’en 2040.
  • Prise en compte de la durée de vie des chauffages fossiles installés après 2020 : obligation remplacée dans un délai de 20 ans — prolongée jusqu’en 2046 pour certains cas.
  • Régime de dérogations adapté : possibilité de dérogation en cas de très faible consommation, conventions d’objectifs pour propriétaires de ≥ 3 bâtiments.

Ces précisions traduisent la volonté du canton de Vaud de rendre la loi applicable, pragmatique et équitable, tout en respectant les réalités du terrain.


Mise en œuvre et accompagnement : un investissement massif

La première phase de mise en œuvre, entre 2026 et 2032, mobilisera près de 800 millions de francs, ce qui représente en moyenne plus de 100 millions par an.
Cette enveloppe financera :

  • Les subventions pour l’assainissement des bâtiments.
  • Le développement des énergies renouvelables pour l’électricité et le chauffage.
  • Les programmes de formation, de sensibilisation et l’accompagnement des propriétaires, locataires, entreprises et communes.
  • Le guichet numérique public et la simplification des procédures (ex. simple annonce pour panneaux solaires ou pompes à chaleur).

L’investissement financier mais aussi humain montre que la réforme n’est pas simplement un texte, mais un projet de transformation collective.


Effets concrets attendus : quels résultats pour 2032 et au-delà ?

Le texte présente des objectifs mesurables, gages de sérieux :

  • « Plus de 10 000 bâtiments rénovés dans la première phase d’ici 2032. »
  • Décarbonation du chauffage.
  • Réduction de 80 % des émissions liées au bâtiment dans le canton.
  • Le solaire couvrant plus de la moitié des besoins en électricité.
  • Une énergie rationalisée, un gaspillage éradiqué, des factures allégées pour les consommateurs.

Pourquoi ces effets sont-ils importants ?

Ils traduisent une vision systémique : le bâtiment et l’énergie ne sont plus traités séparément. Chaque kilo de CO₂ évité, chaque kilowattheure d’origine renouvelable produit localement, chaque bâtiment rénové, participe à la création d’un modèle énergétique durable et local.
Pour les habitants, cela signifie un double gain : environnemental (réduction des émissions, meilleure qualité de vie) et économique (réduction des coûts d’énergie, valorisation du patrimoine immobilier).


Réflexion approfondie : quel impact pour vous (citoyens, propriétaires, locataires) ?

Pour les propriétaires de bâtiments

L’assainissement et l’obligation de remplacement des systèmes fossiles vont générer des coûts mais aussi des opportunités : valorisation de l’immeuble, amélioration du confort, réduction des charges. Il sera primordial d’anticiper : audit énergétique, planification budgétaire, choix des bonnes solutions (pompe à chaleur, solaire, géothermie).
La distinction entre petits et grands propriétaires permet une temporalité adaptée, ce qui est une qualité pour la loi – elle ne gomme pas les différences mais les prend en compte.

Pour les locataires

Même si la réforme touche principalement les propriétaires, les locataires sont concernés via la qualité du logement, la facture énergétique et l’impact sur la valeur locative. Une rénovation énergétique peut mener à un meilleur confort (température, bruit, qualité de l’air) et à des charges plus stables.

Pour les entreprises, artisans, secteur de la construction

Cette réforme va créer de nouvelles dynamiques économiques : marché des rénovations, installation de panneaux solaires, maintenance des systèmes renouvelables. Une opportunité de croissance, mais aussi un besoin de montée en compétences (formateurs, main-d’œuvre qualifiée) mentionné par la loi.

Pour la collectivité et le territoire vaudois

Au-delà des individus, la loi vise à renforcer l’autonomie énergétique du canton, mieux exploiter ses ressources locales, et s’inscrire dans une trajectoire commune de décarbonation. Cela renforce l’attractivité du territoire et peut servir de modèle pour d’autres cantons ou régions.


Enjeux et défis à venir

  • Respect des délais : 2026-2032 est une échéance proche pour une première phase. Le rythme devra être soutenu.
  • Mobilisation des acteurs : propriétaires, artisans, communes, entreprises doivent être engagés et soutenus.
  • Financement : même avec les 800 millions prévus, la portée reste importante et nécessitera des synergies public-privé.
  • Acceptation sociale : les obligations (rénovation, remplacement de chauffage) peuvent être perçues comme contraignantes. La communication et l’accompagnement sont clés.
  • Technologie et Main-d’œuvre : le développement des renouvelables demande un bon déploiement technique et une main-d’œuvre formée.
  • Suivi et contrôle : la mise en œuvre sera complexe et devra être rigoureusement suivie pour garantir les effets attendus.

Conclusion : un tournant historique pour l’énergie dans le canton de Vaud

Avec le projet de loi sur l’énergie, le canton de Vaud prend le pari d’un avenir énergétique plus propre, plus local, plus sobre. Il ne s’agit pas seulement d’une loi mais d’un véritable plan de transformation. Le texte ouvre la voie à une participation collective : chacun – citoyen, propriétaire, entreprise, collectivité – a un rôle à jouer.
Pour vous, acteur ou simple habitant, c’est le moment idéal pour vous informer, planifier, vous poser les bonnes questions : suis-je prêt à entreprendre une rénovation ? Mon bâtiment est-il bien isolé ? Mon système de chauffage est-il obsolète ? Et surtout : comment contribuer à cette transition qui concerne notre avenir commun ?

Si vous habitez le canton de Vaud, suivez les développements législatifs, anticipez les échéances, et saisissez les subventions et accompagnements qui seront disponibles : la transition énergétique n’attend pas.

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